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Double champion d’Afrique avec les Lions A et les locaux, Aliou Badara Faty fait aujourd’hui les beaux jours du TP Mazembe en RD Congo. Le gardien de but de 26 ans a accordé un entretien à Dsports. Il a abordé les performances actuelles du TP, sa vie en RDC, ses buts sur penalty, ses envies d’Europe et surtout sa nostalgie de la sélection du Sénégal.
Après 12 journées de championnat, votre équipe est leader avec 31 points. Une incroyable solidité défensive avec seulement 3 buts encaissés…
Si on en est là, c’est grâce à la concentration de toute l’équipe. De moi et de tous les autres joueurs. On en parle souvent avec mes coéquipiers avant les matchs. Nous voulons vraiment concéder le moins de but possible. On peut jouer 5 matchs sans encaisser de but et c’est une bonne chose. Le coach aussi insiste là-dessus. Il demande un maximum de concentration durant les matchs et de ne sous-estimer aucun adversaire. Gagner le championnat avec la manière c’est notre objectif, et on y travaille. On espère y arriver s’il plaît à Dieu.
Votre rôle est de garder vos cages inviolées mais on vous voit souvent sortir de votre zone de confort pour aller tirer et transformer les penalties. Vous êtes réellement le tireur numéro 1 de l’équipe ?
C’est le choix du coach depuis l’année dernière. Il me suivait depuis Casa Sports. Il sait que j’avais l’habitude de tirer les penalties parce que le coach Ansou Diadhiou aussi me faisait confiance sur cet exercice. A mon arrivée ici en RDC, on faisait des séances de tirs au but et beaucoup de joueurs rataient leurs tentatives sauf moi. J’arrivais à marquer tous mes tirs. Lors de la 1ère journée en championnat on avait un penalty et l’attaquant avait raté. Je n’étais pas titulaire ce jour-là. Pareil à la 8e journée, notre meilleur buteur également a raté un penalty.
Après ce deuxième raté, le coach Lamine Ndiaye m’a choisi comme tireur. En plus, comme les supporters sont très exigeants, certains joueurs hésitent à tirer. Lors du match de Ligue des champions contre Mamelodi Sundowns, c’est le coach, lui-même, qui m’a demandé de tirer. Je l’ai fait et j’ai marqué. Au Casa Sports, j’ai transformé au total 7 penalties dans des séances de tirs au but. La saison passée, au TP Mazembé, j’ai marqué 3 penalties en cours de match. Cette saison, j’en suis à 4 réussites. Les 3 sont en championnat et l’un en Ligue des champions.
La saison dernière, le TP Mazembé avait atteint la demi-finale de la Ligue des champions. Cette année cependant, c’est une élimination dès la phase de poules alors que vous étiez favori de votre groupe devant des équipes comme MC Alger, Young Africans et Al Hilal. Que s’est-il passé ?
On a beaucoup de jeunes dans l’équipe cette saison. Plusieurs joueurs ont quitté le club durant le mercato. On n’a pas eu l’expérience nécessaire pour passer ce cap. Quand on a débuté la Ligue des champions, on était moins de 25 joueurs. Certains des joueurs n’avaient jamais joué de match de championnat. Nous espérons, en tout cas, revenir en force la saison prochaine pour pouvoir remporter le titre.
Vous partagez le vestiaire du club avec Jean Louis Diouf, Mor Talla Mbaye et l’entraîneur Lamine Ndiaye. Comment se passe la vie entre compatriotes à Mazembé ?
Jean, Mor Talla et moi partageons d’ailleurs le même appartement. Ça se passe bien et sans souci. Au début, c’était un peu difficile pour la nourriture et la vie d’ici mais ensemble on a réussi à nous adapter.
Que représente Lamine Ndiaye pour vous ?
Il nous conseille souvent sur le terrain comme en dehors. Je peux dire que c’est lui notre père ici. Des fois, nous allons chez lui pour discuter de tout et de rien. Il nous regarde comme ses propres enfants. Ça ne veut pas dire qu’il n’est strict avec nous. A l’entrainement, ça peut être tendu mais après les séances, il nous appelle et nous conseille. Notre relation est désormais au-delà du cadre entraîneur-joueur. C’est un homme bien généreux et compréhensif.
Vous avez démarré en tant que numéro 2, aujourd’hui vous êtes le titulaire indiscutable au poste de gardien. Comment avez-vous réussi à retourner la situation en votre faveur ?
C’est un moment que j’ai tellement attendu. J’ai attendu mon heure en m’entrainant matin, midi et soir. Il y avait quatre autres gardiens avant moi. J’étais donc le cinquième. Ils étaient tous plus âgés que moi. Ils ne faisaient qu’une séance par jour et moi j’en faisais deux ou trois. Un jour le coach m’a choisi. L’équipe a gagné 2-0, j’avais réussi un bon match. Ensuite on a enchainé par un 3-0, fait un match nul 0-0 et un autre 3-0. J’ai ainsi gagné ma place alors qu’ils n’avaient pas confiance en moi. Toute l’équipe estimait que j’étais frêle pour les cages.
On parle de TP Mazembé comme l’un des clubs les plus structurés du continent avec des moyens colossaux…
Oui, les conditions sont réunies pour jouer et pour être un grand joueur ici. Je me sens bien à l’aise. C’est un grand club. Il y a beaucoup de visibilité. Le club est structuré et les infrastructures bien équipées.
En RD Congo, il n’y a pas que Lamine Ndiaye. Sur le banc de l’AS Vita Club, un certain Youssoupha Dabo est en train de réussir sa première. Une menace pour Mazembé dans la course au titre ?
Non, il n’est pas une menace pour nous. Ils sont à Kinshasa et nous à Lubumbashi. On ne peut se croiser qu’en play-offs. C’est un championnat à deux poules dans le championnat : 12 équipes de chaque côté. Les 6 premières jouent les play-offs pour déterminer qui sera champion. Mais ce ne sera pas facile pour nous comme pour eux, chacun de nous fera le voyage. Leurs supporters sont exigeants et nos supporters aussi. AS Vita est l’un des plus grands clubs de la RD Congo. Pour le moment, je ne regarde pas trop leurs matchs mais j’espère que Youssouph Dabo et son équipe seront qualifiés pour les play-offs. On pourra avoir des duels entre Lions (Rires).
Après Casa Sports, la suite de vote carrière était plus orientée vers l’Europe. Pourquoi avez-vous choisi le TP Mazembé ?
C’est au dernier moment que j’ai choisi de rejoindre le TP Mazembe. J’étais en France pour faire des tests après je suis revenu parce que le Casa Sports et ce club n’ont pas trouvé d’accord. A un moment donné, il y a plusieurs rumeurs mais rien de concret. Je ne voulais donc plus perdre mon temps. Après, j’ai vu le projet du TP et les dirigeants me voulaient vraiment et puisque je voulais changer, j’ai décidé de partir. Mes frères m’ont aussi conseillé de saisir cette opportunité du TP Mazembe qui est un grand club africain. Au Casa Sports, le président Seydou Sané voulait que je prolonge mais j’avais envie de vivre un autre défi. Certains autour club ont même dit que j’avais changé depuis mon retour de la Coupe d’Afrique. Ce n’était pas ça. J’avais envie de franchir un palier.
Vous comptez rester en RDC pour combien d’années encore ?
Je veux jouer en Europe. Ça a toujours été dans mes objectifs de jouer en Europe dans les grands clubs européens. Je suis à ma dernière année ici avec le TP. J’espère pouvoir relever de nouveaux défis. Je n’ai pas encore reçu de propositions avec le TP mais je pense que la Direction souhaite que je reste. Je veux vraiment rejoindre l’Europe, réaliser mon rêve. Toutefois si je ne reçois pas de propositions en Europe et que TP me propose d’y rester je le ferais.
Parlons de l’équipe nationale du Sénégal. Votre dernière convocation remonte à mars 2022. La Tanière vous manque ?
Oui évidemment que l’équipe nationale me manque. Les joueurs et tout. J’ai appris beaucoup d’eux et c’était un plaisir de partager et d’apprendre auprès de grands joueurs comme Edouard Mendy, Sadio Mané, Gana Guèye et Kalidou Koulibaly. J’aimerais revenir en équipe nationale. Ça fait partie de mes objectifs de défendre une nouvelle fois les couleurs du Sénégal. C’est une fierté pour tout un chacun de représenter son pays dans les plus grandes compétitions. Ce sera un énorme plaisir pour moi de revenir en équipe nationale.
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Aujourd’hui le sélectionneur se nomme Pape Thiaw que vous connaissez bien, vous avez gagné ensemble le CHAN en 2023. Sa présence sur le banc peut-elle faciliter votre retour en sélection ?
Non je ne crois pas que ça sera facile. C’est vrai que j’étais son deuxième capitaine mais les niveaux sont différents c’est compliqué avec l’équipe nationale. Ce n’est pas parce qu’on était là-bas que forcément ce sera facile. L’équipe nationale, c’est une très grande exigence. Il y a beaucoup de concurrence. Il y a de grands gardiens et le choix est toujours difficile. Je continuerai à travailler dur pour mériter ma place en sélection et je crois que mon heure viendra et je la saisirai. C’est pourquoi je travaille beaucoup en club pour garder ma forme et revenir en sélection s’il pâlit à Dieu.
Vous êtes toujours en contact lui ?
Oui on est en contact mais on se parle rarement. La dernière fois qu’on s’est parlé, c’était lors de son anniversaire. Je lui ai souhaité un très bon anniversaire.
En sélection, on parle d’un secteur où il y a déjà Mendy, Mory et les possibles arrivées de Yehvann et Massamba. Vous y croyez vraiment ?
C’est de très grands gardiens mais j’ai confiance en moi et je suis prêt à les concurrencer mais l’essentiel c’est le Sénégal qui gagne. Quel que soit celui qui sera dans les cages. On a tous les mêmes objectifs, la réussite du Sénégal. Ils sont certes plus expérimentés que moi ils, ils jouent dans les plus grands championnats mais j’ai aussi des arguments.
Trois ans après le sacre au Cameroun, l’euphorie est toujours là ?
Non même pas, on est déjà passé à autre chose. On a d’autres objectifs alors il faut de la concentration pour les atteindre. Mais quand même ça reste toujours une fierté et je suis enthousiasmé dès que j’y pense comme tous les sénégalais on est content quand on y repense. A jamais les premiers nous sommes. Maintenant, il est temps d’aller chercher le deuxième sacre. J’aimerais faire partie de ce groupe.
Parlons du Casa Sports, votre ancien club qui n’y arrive plus depuis le dernier titre de champion en 2022. C’est quoi le problème selon vous ?
Oui je suis rarement les matchs, c’est difficile avec le Pay-Per-View que je ne comprends pas beaucoup comment ça fonctionne. Je crois que c’est parce qu’ils ont beaucoup de jeunes joueurs inexpérimentés qui ne connaissent pas la compétition et qui n’ont jamais joué la Ligue 1. Notre génération, la plupart sont partis, il n’y a que le capitaine Mohamed Camara qui est encore là-bas.
Le club a-t-il toujours les moyens de ses ambitions ?
Oui je crois que le Casa Sports reviendra bien plus fort. Casa Sport reste Casa Sport. Il y a juste des hauts et des bas dans la vie d’une institution mais ça finira par s’arranger. C’est l’un des plus grands clubs du Sénégal, et ce serait dommage qu’ils jouent pas en ligue 1, personne ne le souhaite. J’espère de tout cœur qu’ils s’en sortiront. Ils peuvent le faire et inchaAllah. Ils le feront, ils atteindront leurs objectifs.
Propos recueillis par Ndèye CAMARA
Bonne continuation keeper et merci beaucoup à vous DSport pour l’entretien avec notre frère ♥️🙏