L’AS Pikine traverse une période délicate, aussi bien sur le terrain qu’en coulisses. Après 17 journées de championnat, le club pointe à une inquiétante 13ᵉ place, loin des ambitions affichées en début de saison. Mais au-delà des résultats sportifs décevants, la situation financière du club de la banlieue dakaroise est encore plus préoccupante.
Entre salaires impayés, primes en attente et dettes accumulées, l’AS Pikine est en pleine tourmente économique. Pourtant, les chiffres dévoilés ces dernières saisons révèlent un budget en constante augmentation, mais qui peine à se traduire par une gestion saine et durable.
Une évolution budgétaire en dents de scie (2019-2023)
L’AS Pikine a vu son budget croître de manière significative au fil des saisons, notamment grâce aux subventions et à certaines recettes exceptionnelles. Cependant, cette augmentation des ressources n’a pas suffi à stabiliser les finances du club, qui reste marqué par une forte dépendance aux aides publiques et une gestion déficitaire à certains égards.
L’évolution du budget de l’AS Pikine montre une augmentation de près de 86% en seulement quatre ans, grâce à des appuis financiers conséquents, dont une aide de 100 millions FCFA du président Macky Sall en 2022.
Cependant, malgré ces hausses budgétaires, le club peine à équilibrer ses finances. Les subventions publiques et municipales restent la principale source de financement, représentant en moyenne 35 à 40 % des recettes chaque saison.
L’autre problème majeur réside dans l’endettement croissant du club. L’AS Pikine a dû recourir à des avances de trésorerie chaque saison, atteignant un pic de 95 millions FCFA en 2022-2023, soit près de 23% des recettes totales.
Une explosion des dépenses : où va l’argent ?
Si les recettes du club augmentent, les dépenses connaissent aussi une flambée inquiétante. Les investissements massifs ne semblent pas toujours être suivis d’une gestion rigoureuse, ce qui pèse lourdement sur les finances du club.
Avec une masse salariale de plus de 90 millions FCFA en 2022-2023, l’AS Pikine doit verser en moyenne 10 millions FCFA par mois à ses joueurs et son staff. Un poids énorme, surtout lorsque les recettes ne suivent pas.
En 2022-2023, l’AS Pikine a investi près de 75 millions FCFA dans l’acquisition d’un bus, une décision qui a suscité de nombreuses critiques en interne. Certains estiment que cette dépense aurait pu être reportée ou mieux amortie pour éviter de fragiliser les finances du club.
Les joueurs menacent de boycotter le match de la 18e journée
Chaque saison, une part importante du budget sert à rembourser des dettes et des avances de trésorerie. En 2022-2023, plus de 111 millions FCFA ont été affectés au remboursement des créances, soit plus d’un quart du budget.
Malgré ces budgets conséquents, la situation actuelle est alarmante. Depuis deux mois, les joueurs et le staff n’ont pas perçu leurs salaires, ce qui a conduit à une grève et à un boycott des entraînements.
Les primes de signature, ainsi que celles des derniers matchs (contre HLM, Jaraaf et Dakar Sacré-Cœur), ne sont toujours pas payées, ce qui exacerbe la colère des joueurs. Selon un des joueurs contactés, le groupe a même menacé de boycotter le match de la 18e journée qui les opposera à Ajel de Rufisque. Le plus difficile pour eux, c’est de savoir à quel dirigeant se fier. Le président Mamadou Guèye est depuis plusieurs semaines en Europe. Et ce n’est pas certain que l’ancien dignitaire de l’APR revienne de sitôt. Modou Fall, le président délégué, est loin de faire l’unanimité auprès des joueurs. Certains l’accusent d’ailleurs d’avoir été l’origine de la situation. »C’est lui qui a négocié les contrats et fait des promesses de primes difficiles à honorer », explique notre interlocuteur.
Une subvention municipale qui tarde à arriver
L’AS Pikine dépend d’une subvention municipale annuelle de 100 millions FCFA, mais jusqu’à présent, seuls 50 millions ont été débloqués. Cette attente complique la gestion quotidienne du club et alimente la crise.
Face à cette situation, la direction du club garde le silence. Le manager général, sollicité par Dsports.sn, a refusé de s’exprimer, expliquant que la direction lui aurait interdit toute déclaration.
L’AS Pikine doit impérativement revoir son modèle économique pour éviter un effondrement financier.
Khadim DIAKHATÉ
