Entretien exclusif – Pape Thiaw : « Si nous voulons être champions, nous devons battre les meilleurs »

Après le tirage au sort de la CAN 2025, le sélectionneur national Pape Thiaw s’est confié à Dsports depuis le Maroc. Pour sa première grande compétition en tant que coach des Lions de la Teranga, il évoque son groupe, ses ambitions et les défis qui l’attendent.

Dsports : Pape, pour la première fois, vous allez disputer une CAN en tant que sélectionneur. Que pensez-vous du groupe D, composé de la RD Congo, du Bénin et du Botswana ?

Pape Thiaw : Le constat est simple : ce groupe n’est pas facile. Ces équipes méritent pleinement leur place à cette CAN, elles ont prouvé leur valeur lors des éliminatoires, qui étaient très disputés. Leur qualification montre qu’il n’y a plus de petites équipes en Afrique. En tant que sélectionneur, mon rôle est d’être à la hauteur de ces défis. Avec l’amour que nous portons pour cette équipe et le soutien indéfectible de nos supporters, nous avons l’obligation d’assumer notre statut. Si nous voulons être champions, nous devons battre les meilleurs.

Aujourd’hui, le Sénégal est une référence. Nous sommes 2e en Afrique et 17e au classement mondial, et ce résultat est le fruit d’un travail collectif : la Fédération, la Direction technique et les efforts de l’État pour nous mettre dans les meilleures conditions.

Dsports : Être sélectionneur des Lions, est-ce un poids ou un privilège pour vous ?

Pape Thiaw : C’est à la fois une grande responsabilité et un immense honneur. Le Sénégal n’a plus besoin d’être présenté sur la scène internationale. Être dans le top 20 mondial n’est pas donné à n’importe qui. Mais je tiens à préciser que c’est un travail collectif. J’ai apporté ma contribution, comme d’autres avant moi, et cela a permis à cette équipe de briller. Avec une équipe comme celle-là, n’importe quel entraîneur serait mis en lumière.

Dsports : Vous avez vécu des moments compliqués avant votre nomination officielle. Comment avez-vous géré tout cela ?

Pape Thiaw : Je suis quelqu’un de très croyant. Je fais confiance à Dieu et je m’appuie sur cette foi pour avancer. Tout le monde a droit à son avis sur l’équipe nationale, et c’est normal. Moi-même, j’ai souvent donné mon avis sur divers sujets, alors je ne peux pas empêcher les gens de s’exprimer sur moi. Personnellement, je me concentre sur le travail.

Dsports : Et votre famille, comment a-t-elle vécu cette période ?

Pape Thiaw : Je protège toujours ma famille. Peut-être que c’était un peu difficile pour eux, mais j’ai établi une barrière pour qu’ils soient moins exposés. Leur silence sur ce débat montre qu’ils cherchent à me protéger, eux aussi.

Dsports : Depuis que vous êtes en poste, on a remarqué un changement dans le jeu, notamment au niveau offensif. Qu’en pensez-vous ?

Pape Thiaw : Ce qui compte le plus pour moi, c’est le collectif. Ce qui me rend heureux, c’est de voir mes joueurs épanouis, aussi bien sur le terrain qu’en dehors. Les statistiques, c’est bien, mais les résultats parlent d’eux-mêmes. L’essentiel, c’est de construire une équipe où chacun se sent important.

Dsports : Vous êtes très proche de vos joueurs. Quelle est la différence entre Pape Thiaw le coach et Pape Thiaw le grand frère ?

Pape Thiaw : Quand je suis sur le terrain, il n’y a pas de sentiments. Là, c’est Pape Thiaw le coach qui parle. Mais en dehors du rectangle vert, je suis toujours disponible pour échanger sur tout et rien. J’ai des affinités avec certains joueurs, mais une fois sur le terrain, il y a une barrière. Ces joueurs sont très respectueux et responsables, ils rendent mon travail plus simple.

Dsports : Quels sont vos objectifs pour cette CAN ?

(Rires) Je t’avais prévenu que je ne répondrais pas à cette question. Restons sur ce qui est prévu dans notre entretien.

Dsports : Le football africain progresse beaucoup. Que pensez-vous des autres équipes et des chances du Sénégal ?

Le football africain évolue énormément, et cela se reflète à chaque CAN. Cette année, nous jouerons dans neuf stades, un symbole fort de cette progression. Aujourd’hui, beaucoup d’équipes se valent, et il n’y a plus de petites nations. Voir une équipe comme le Ghana, quadruple champion d’Afrique, absente de cette édition montre que le niveau s’est élevé. Nous devons continuer à travailler, car le plus difficile n’est pas d’atteindre le sommet, mais d’y rester.

Dsports : De nombreux binationaux toquent à la porte de la sélection. Êtes-vous en contact avec eux ?

Bien sûr. J’ai un œil attentif sur tous les joueurs sénégalais. Je ne peux pas tout faire seul, c’est pourquoi j’ai des superviseurs qui m’aident à suivre les joueurs, surtout ceux qui jouent les week-ends. Par exemple, Robinho Vaz, le jeune joueur de Marseille, m’a été signalé avant même qu’il ne joue.

Dsports : Et vos relations avec vos adjoints et les cadres de l’équipe ?

La communication est essentielle pour moi. Avec mes adjoints, comme Teddy Pellerin, ou avec les cadres, nous discutons pour fixer les objectifs. Ces échanges me permettent d’apprendre beaucoup de choses. Les joueurs sont très responsables et engagés, ce qui facilite le travail.

Dsports : Vous êtes également un fervent défenseur du football local. Que pensez-vous de nos équipes et de leur contribution à l’équipe nationale ?

J’ai toujours cru au potentiel de notre football local. J’ai moi-même joué dans le championnat sénégalais et je connais bien les réalités. Je regarde presque tous les matchs et je discute avec des observateurs pour suivre les talents émergents. Nous avons des joueurs de grande qualité, et je suis convaincu qu’ils ont leur rôle à jouer dans l’équipe nationale. Je ne parle même pas des matchs mais même les entraîneurs des équipes je les rate pas.

Entretien réalisé par Mbaye SENE à Rabat pour Dsport TV (retranscrit par Khadim Diakhaté)