Dans le tout premier onze de l’équipe nationale du Sénégal indépendant qui a joué contre la Gambie, figurait un joueur d’exception, Souleymane Jules Diop. Un défenseur central de très grande classe que certains observateurs considèrent encore comme l’un des meilleurs que notre pays ait connu. Joueur du Réveil de Saint Louis, il a fait un court passage en équipe nationale. En 1984, à la veille de la Tabaski, il a disparu et sa famille n’a plus eu de ses nouvelles.
Né le 24 Septembre 1935, Souleymane Jules Diop a eu sa première sélection le 05 novembre 1961, face à la Gambie. Ce match était remporté par le Sénégal sur le score de 5-3. Entre ce premier match du Sénégal et la finale des Jeux de l’Amitié de 1963, Souleymane Jules Diop a obtenu 7 sélections. Aux jeux de l’Amitié de 1963, le joueur du Réveil de Saint a été titulaire indiscutable et a pris part à toutes les rencontres. Il fait partie de ceux qui ont inscrit le nom du Sénégal au palmarès de cette compétition.
Hélas, ces jeux de l’Amitié resteront la seule compétition à laquelle Souleymane Jules Diop a participé avec l’équipe nationale. Dans cette équipe médaillée d’or aux jeux de l’Amitié, figuraient également Yatma Diouck, Bouba Diakhao, Domingo Mendy et Demba Thioye. Justement, Demba Thioye ancien attaquant, se souvient de ce défenseur hors pair : « Il avait beaucoup de qualités. Jules Diop me donnait du courage et une motivation supplémentaire. Il demandait aux attaquants de marquer et lui, et les autres défenseurs se chargeraient de barrer la route à ceux d’en face. Cet homme était également un ange gardien pour nous. Il nous disait de foncer vers l’avant et que les coups que nous recevions seraient rendus aux adversaires ».
Libéro de charme
Souleymane Jules Diop savait jouer avec ses deux pieds, ce qui était un grand avantage pour lui. L’ayant vu à l’œuvre, le Journaliste Abdoulaye Diaw se rappelle avec fierté, au micro de Dsports, de ce footballeur d’exception qu’il connaît bien, en ces termes : « Il était un libéro très technique, très élégant. Grand, il savait aussi se montrer efficace dans le jeu aérien. Joueur très doué, il avait une technique digne d’un attaquant même s’il jouait en défense. Son style se rapproche de celui de Roger Mendy. C’était un homme très correct également et respectueux ».
«Libéro de charme », c’est l’expression utilisée par Serigne Aly Cissé, pour qualifier Jules Diop sur un terrain de foot. Le journaliste, dans son livre, « Sénégal carton rouge » loge Souleymane Jules Diop dans la même catégorie que Germain Ngom, Alioune Badara Gueye Blé, Younousse Diallo, pour « son aisance impériale au poste d’arrière central ».
«On ne le sortait jamais du terrain»
Le natif de Saint Louis a marqué les esprits. Toutes les personnes qui l’ont vu jouer parlent de sa technique et de son élégance sur un terrain de foot. Alioune Diagne (ancien joueur de l’Espoir de Saint Louis et de l’équipe nationale), n’est pas en reste. Il déclare : « Jules était un arrière central comme moi. C’était un joueur très technique et qui avait de la classe. Il avait un tempérament doux et n’avait pas besoin de faire une faute sur l’adversaire.»
Homme très correct et discipliné, Jules Diop aimait bien ce qu’il faisait. Sur le terrain de foot ou au travail (il était soudeur métallique aux Travaux Publics de Saint Louis), il était irréprochable. Son coéquipier en équipe nationale et au Réveil de Saint Louis, Yatma Diouck se souvient d’un joueur qu’on ne mettait jamais sur le banc : « Il n’était ni remplaçant et on ne le sortait pas en cours de match, ni au Réveil ni en équipe nationale. Je le considère comme le meilleur défenseur central de de l’histoire du Sénégal. Je ne me souviens pas d’un carton qu’il a reçu ».
Une disparition énigmatique
Malgré son immense talent, ses qualités de travailleur et son sens du devoir, Souleymane Jules Diop va très tôt manquer à l’équipe nationale et sa famille. L’histoire de cet homme dont « l’apprentissage du Coran aura contribué à l’éducation, pour faire de lui quelqu’un de très courtois et discipliné » selon Abdoulaye Diaw, va connaître un tournant énigmatique en 1984. Arame Diop, sa fille, raconte : « J’avais 8 ans quand mon père disparaissait. Il est parti de Saint Louis, à la veille de la Tabaski de l’année 1984. En quittant la maison, il avait déjà acheté un mouton. Il est parti pour Dakar, acheter des tissus pour la famille dans le cadre de la préparation de la fête. On ne l’a plus revu depuis et ça fait 40 ans maintenant ».
Sa disparition constitue une énigme pour tous ses proches. Son frère, Abdoulaye Diop, papa de Pape Malick, ancien capitaine de l’équipe nationale a fait le tour du Sénégal, voyageant de ville en ville dans l’espoir de le retrouver. En vain. Arame, sa fille ainée, encouragée par les beaux témoignages sur son père, ne lâche pas. Elle vit toujours dans l’espoir de retrouver cet être qui lui est si cher, ce footballeur qui a marqué son époque : «nous gardons toujours l’espoir de le retrouver un jour ».
En attendant ces retrouvailles la fille de Souleymane Jules Diop constate avec regret « un manque de reconnaissance des autorités étatiques et du football ».
Abdoulaye DIOUF, correspondant Dsports.sn à Thiès
Merci de nous faire connaître cet grand homme du football sénégalais. Je compatis à la douleur de ses proches.
Très bel article du journaliste.