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Idrissa Niang et Sadio Mané

Certains sénégalais l’ont connu en août dernier lorsque dans l’entrejeu d’Al Shorta SC, champion d’Irak en titre, Idrissa Niang donne du fil à retordre à Al Nassr de Sadio Mané en demi-finale de la Coupe arabe. Pour les habitués de la Ligue 1 sénégalaise? ce n’était point une surprise. Idy, infatigable milieu défensif, a très tôt porté le brassard de capitaine à la CSS au début des années 2010. Il migre ensuite au Jaraaf où il devient incontournable dans l’entrejeu. Dans cet entretien qu’il accorde à Dsports.sn, il efface plusieurs idées reçues sur l’Irak dont la seule évocation du nom fait penser à ‘’guerre, bombes, Sadam Hussein, insécurité, terrorisme’’. Il y joue au foot dans la paix et la joie depuis 4 ans.

Idrissa Niang, cela fait 4 ans que tu joues en Irak. On a vu que chaque année, tu as changé de club. Racontes-nous un peu comment ça se passe.

Idrissa Niang : Je suis à ma quatrième année en Irak. C’est un championnat d’un bon niveau. J’enchaine de bonnes performances. Ces performances m’ont permis aujourd’hui de jouer dans un grand club Irakien. J’ai commencé à Al Mina’a SC, un club qui joue pratiquement le maintien chaque année. J’avais fait là-bas une bonne saison. Ensuite je suis parti à Bagdad à Al Talaba SC, un club qui joue le titre de champion. Pour ma troisième saison, j’ai quitté Bagdad pour Al Shorta SC, le plus grand club du pays avec Al Jawiya. Ce sont les deux clubs qui luttent chaque année pour le titre de champion. J’y ai gagné le championnat et la Coupe de la Ligue.

L’Irak n’est pas une destination fréquente pour les Sénégalais. Vous êtes combien dans le championnat ?

Le championnat irakien n’est pas, il est vrai, une destination habituelle pour les joueurs sénégalais. Actuellement, nous sommes cinq joueurs sénégalais en Irak. Il y a moi, Daouda Guèye Diémé (ancien du Jaraaf et du Port), Dominique Mendy, milieu défensif gaucher, passé par Génération Foot. Il était en Tunisie avant de venir ici. Il y a également Demba. Et en deuxième division, il y a Ibrahima Diop, ancien joueur du Jaraaf aussi.

                             «Pendant des mois, j’ai caché à mon père que j’étais en Irak»

Quand on dit Irak ou Iran, on pense d’abord à la guerre, à l’insécurité. Quelle a été ta première réaction quand un club irakien s’est intéressé à toi ?

Je ne m’en cache pas, la première fois qu’un club irakien m’a contacté, j’étais un peu étonné. J’avais la même crainte que tout le monde. On pense forcément à la guerre, à l’insécurité. Pour dire vrai, je n’en avais même pas parlé à ma famille. Quand j’ai informé certains de mes proches, je leur ai demandé de dire à mon père que j’étais au Koweït (rires). Il m’aurait certainement dissuadé si je lui avais clairement dit que j’étais en Irak. C’est après plusieurs mois que je lui ai tout expliqué. Il était un peu hors de lui mais je l’ai rassuré parce que tout se passait bien. Il a compris. Mais à chaque fois qu’il y a des événements en Israël ou en Iran, ils s’inquiètent. La presse envenime la situation mais nous au quotidien on vit normalement. Nous vivons dans la paix. Sans souci. Nous rendons vraiment grâce à Dieu.

Justement comment sont vos quotidiens, ce n’est pas trop stressant ?

Mon quotidien est simple. Je vais aux entraînements. Après je rentre me reposer. De temps en temps, je sors me promener en ville et prendre l’air. Tout au calme. Sincèrement, c’est comme si je vivais au Sénégal. Il n’y a vraiment pas de crainte à se faire pour la sécurité. Sportivement, les stades sont remplis. Le championnat est très disputé et intense. On voyage entre les villes pour les matchs à l’extérieur sans aucune restriction. Le seul inconvénient, c’est que l’on voyage pratiquement à chaque fois par bus alors que le pays est très grand. Il n’y a que sur deux destinations que nous partons par avion.

Beaucoup de Sénégalais ont regardé l’an passé votre demi-finale de Coupe arabe contre Al Nassr de Sadio Mané et Cristiano Ronaldo (défaite 0-1 d’Al Shorta AC). Comment as-tu apprécié la réaction des Sénégalais surpris par ta bonne prestation ?

J’avoue que la Coupe arabe a été une très belle vitrine. Notre équipe a fait forte impression et montré que le championnat irakien était d’un bon niveau. Ça a permis d’effacer beaucoup de clichés sur le pays. Les gens ont commencé à comprendre que les équipes irakiennes étaient compétitives. L’Irak se reconstruit bien et la Fédération irakienne de football investit énormément dans le championnat. Il y a plein de recrues, de bons joueurs brésiliens. Tu as des joueurs africains qui sont ici et qui sont régulièrement appelés en sélection. Il y a des internationaux togolais et ougandais.

Sadio Mané et Cristiano Ronaldo n’ont pas essayé de te recruter à la fin du match ?

Sadio Mané m’a demandé ce que je faisais en Irak (rires). Je lui ai répondu ‘’le foot mène partout’’. Il m’a dit ‘’tu sais que tu as ta place dans notre équipe Al Nassr’’. Je lui ai rétorqué ‘’si vous me recrutez, je viens’’. On a rigolé ensemble. Il m’a ensuite offert son maillot et on a pris des photos. C’est un gars très cool et open.

Tu as fait Tunisie, Liban et Irak, c’est quoi la prochaine destination ?

Effectivement, j’ai fait la Tunisie, le Liban et maintenant l’Irak. J’ai sincèrement des propositions venant du Qatar et même de l’Arabie saoudite. A la fin de la Coupe arabe d’ailleurs, j’étais vraiment à deux doigts de signer à Al-Qadsiah FC où évolue actuellement Mbaye Diagne. Mais j’ai trouvé un accord avec mon club irakien pour prolonger mon contrat.

                        «Je rêve de devenir entraîneur, j’adore ça, c’est une passion»

Au Sénégal, tu as joué à la CSS et au Jaraaf, où est-ce que tu as eu des meilleurs moments ?

J’ai passé mes meilleurs moments au Jaraaf. Mais la CSS est la base. Le joueur de football que je suis devenu, c’est grâce à la CSS. Et j’en serai toujours reconnaissant. J’ai été le capitaine de l’équipe. Jaraaf m’a ensuite recruté, j’ai gagné la Coupe du Sénégal (2013). Nous étions aussi tout proches du titre de champion en 2014. On l’a perdu à la dernière journée (Pikine a fini champion). J’ai vraiment d’excellents souvenirs de mes moments au Jaraaf.

La CSS qui a longtemps été une référence dans le football sénégalais est aujourd’hui en National. Qu’est-ce qui explique les difficultés du club ?

A la CSS, c’est vraiment compliqué. Je ne comprends même pas. Certainement, c’est la gestion qui pose vraiment problème. Je pense que les gens doivent se mettre autour de la table, discuter des solutions, et mettre les hommes qu’il faut à la place qu’il faut.

Beaucoup de milieux défensifs deviennent des entraîneurs à la fin de leur carrière. Est-ce qu’on peut voir Idrissa Niang un jour sur le banc d’un club ?

Oui, ça fait partie de mes rêves. J’adore ça. C’est une passion. J’y réfléchis. Quel genre d’entraîneur je serai ? J’aime la rigueur mais je suis calme aussi. Pour moi, c’est dans la sérénité que l’on peut inculquer sa philosophie. Je prie vraiment Dieu de devenir un très bon entraîneur connu à travers le monde. En tant que joueur, je n’ai pas réussi à me faire un nom à travers le monde. J’espère le réussir sur un banc.

Recueillis par Demba VARORE

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